Et c'est repartiiii !
Dans la soirée, afin de fêter le début de l’été, un grand feu fut allumé, et tout le monde se plaça autour. Les deux servantes manquaient à l’appel, ainsi que le comte Rosenberg, qui avait décidé de leur tenir compagnie dans les cuisines. Elise discutait avec Isobelle de Kristel, qu’elles n’avaient pas vu de l’après-midi. A leur grande inquiétude, leurs maris non plus ne s’étaient pas montrés. Quelques minutes plus tard, Eleonore s’assit à côté d’elles, les yeux un peu rougis.
- Tout va bien ? s’enquit Isobelle.
- Pas vraiment, non… répondit la princesse d’Allemagne. Je n’ai pas vu Christopher de la journée, et d’après ce qu’Aloysia m’a dit de ce midi…
Elle s’interrompit, on sentait que les sanglots lui montaient dans la gorge. Isobelle et Elise échangèrent un regard soulagé, mais aussi compatissant.
- Tu n’as qu’à aller voir Merwan, proposa Elise. Il est tout seul, aussi.
Eleonore regarda l’homme, qui, en effet, était seul, puis se dirigea vers lui.
- Cette Kristel ne m’inspire rien de bon, murmura Isobelle. J’ai bien vu comment Antonio et Demetrio la regardaient.
- Apparemment, ils la connaissaient d’avant.
- Mais c’est louche, quand même !
- Et puis, sa beauté n’est pas à négliger, commenta Aloysia qui suivait leur conversation. Elle est vraiment envoût ante. Tous les hommes l’ont reluquée pendant le repas.
- Merci de nous rassurer ! s’exclama Elise, amère. Et toi, ton mari, où est-il ?
- Joseph ? J’en sais rien. A Londres, je crois.
Elise et Isobelle échangèrent un regard désolé ; la Weber les exaspérait. Elles choisirent de s’éloigner pour continuer à parler sans être dérangées, et, tout d’un coup, un silence se fit dans l’assemblée.
Kristel venait de les rejoindre. Elle avait troqué sa robe rose pour une robe bleue pâle, ses cheveux blonds étaient à présents noués en hauteur, révélant la finesse de son visage et de son cou. Plus d’un homme resta ébahi. Elle eut un sourire amusé, et s’assit sur un des bancs, autour du feu. Aloysia la regardait sauvagement : jamais, au grand jamais, on ne lui avait pris la vedette. Décidée à rester la seule sur le piédestal, elle se leva, et dans sa grâce qui n’appartenait qu’à elle, elle se dirigea vers Wolfgang qui écrivait un peu à l’écart.
- Monsieur Mozart, auriez-vous l’amabilité, avec vos amis musiciens, de nous jouer un petit air de farandole, pour égayer notre soirée ?
Le musicien leva les yeux vers elle, et son visage fut éclairé d’un sourire. Il répondit qu’il le ferait volontiers, et alla dans sa chambre quérir tout ce dont il aurait besoin. Intérieurement, Aloysia ricana : Kristel aurait bien trop peur de salir sa jolie robe pour danser, et l’attention serait de nouveau tout sur elle. Une dizaine de minutes plus tard, un groupe de sept musiciens s’installèrent, et entamèrent des mesures joyeuses, enjouées, qui donnèrent à tout le monde l’envie de se lancer dans le cercle qui commençait à se former autour du feu. Tout le monde se mit à danser, hors mis Kristel qui, selon les plans d’Aloysia, regarda jalousement les danseurs, Eleonore, et Merwan. Celui-ci annonça à la femme du prince d’une voix morne qu’il allait partir.
- Pardon ?!
- Ouais, à la fin de la semaine, je m’en vais.
- Mais… Pourquoi ? Et où vas-tu aller ? Tu as tout, ici !
Il eut une sorte de rire sans joie, qui rappela à Eleonore dans quelle situation il se trouvait.
- Mais tu ne peux pas partir !
- Parce que tu crois que j’ai envie de rester là ?
- …
Elle ne répondit rien, visiblement choquée, et alla rejoindre les danseurs.
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